Assise au fond de la classe, elle écoute à peine le professeur. Elle est bien trop dissipée pour s’occuper de ce que peux créer deux carrés avec une racine. A vrai dire, Eun Sil est bien trop occupée à réfléchir à son prochain déjeuner, ou à contrôler ses pensées et ses pulsions quant à l’odeur et les pulsations de tous ces petits cœurs faibles que son ouïe est capable d’entendre à présent. Elle déglutit difficilement toutes les dix minutes, essayant de ne respirer le moins possible. Ces odeurs sont mélangées entre dégout et saveur délicieuse. Il ne doit pas y avoir que des humains dans cette salle, seulement, elle serait incapable de trouver qui est l’intrus, qui ne sera pas son festin. Il ne faut pas croire qu’elle ne s’imagine pas planter les crocs dans le cou de la demoiselle aux cheveux bruns lisses retombant dans son dos, en face d’elle. Cette demoiselle n’a même pas remarqué le changement de comportement de la douce Eun Sil. Elle qui parlait souvent, s’occupait souvent de réprimander au professeur des râlements à cause d’un ou deux exercices trop compliqués. Voilà une dizaine de jours qu’elle était revenue de « vacances », c’était l’excuse la plus plausible pour son absence si longue et infini. Vacances ; problèmes familiaux ; décès dans la famille. C’était à la fois vrai et faux. Elle n’avait pas passé de longues vacances sur l’île de Jeju avec sa tante ou son oncle comme elle avait pu le dire. Eun Sil avait plutôt erré à la recherche d’un travail et d’un appartement à louer. C’est avec beaucoup de difficulté qu’elle ne mangeait pas pendant des jours, afin de travailler presque toute la nuit avec les autres serveurs du vieux bar-restaurant qu’elle avait déniché grâce à Min Hee. Quant à l’appartement… Il fallait l’avouer, ce n’était pas le luxe. Elle aurait pu faire un effort de rénovation, mais quand l’on devient un nouveau vampire dans ce monde, est-ce qu’on est censé rénover et décorer son futur chez soi ? Est-ce qu’on est censé revivre comme avant en faisant comme si de rien était ?

Un soupir s’échappe de ses lèvres et le professeur fronce des sourcils en grommelant. Il n’aime pas la voir si silencieuse, peut-être. Seulement, si elle lui parle, elle entendra davantage son cœur et son pouls. L’odeur de son parfum viendra s’insinuer au bord de ses narines et Eun Sil deviendra pâle comme une limande tellement elle retient sa respiration pour ne pas sauter sur l’occasion pour massacrer une classe entière et se rassasier correctement. Tant de problèmes pour une si petit chose… C’est affligeant à quel point la vie de Eun Sil est devenue si trouble et parsemé d’embuches. Elle aurait surement préféré crever plutôt que de supporter ce changement ultime. Eun Sil n’y peut rien. Elle se bat contre toute attente. Elle fait en sorte de ne pas faiblir et de suivre les cours comme elle le peut. Elle vit. Elle « grandit » toujours. Car déjà petite, elle s’imaginait sage-femme ou infirmière. Car déjà petite, elle s’imaginait mariée, avec des enfants, un mari fabuleux et des grands-parents gagas. Seulement, cela n’arrivera jamais. Jamais elle ne se mariera pour de vrai. Jamais elle n’aura d’enfants. Jamais elle ne sera une vraie sage-femme ou une infirmière sans avoir peur de flancher à l’odeur et à la vue du sang. Les hôpitaux, ce sont les lieux les plus redoutées à son actif. Quand un vieil homme l’a retrouvé à l’aube près de la lisière de la forêt, couverte de sang, peu de temps après la mort de ses parents et son réveil, elle a refusé catégoriquement d’y aller. Eun Sil a bien eu raison… On ne sait ce qu’elle aurait pu faire, qui elle aurait pu tuer.

« Miss Seo ? »
« Oui ? »
« Si vous vouliez bien suivre le cours au lieu de rêvasser. »

Elle déglutit difficilement et replonge son nez dans son bouquin jusqu’à la fin du cours. Elle déteste sembler n’être qu’une élève dissipée alors qu’elle a toujours essayé mainte et mainte fois d’être l’une des meilleures, auparavant. Tant de changement et tant de problèmes impossibles à résoudre. Eun Sil désespère presque de n’être qu’une vulgaire petite vampire qui ne sait contrôler ni sa soif ni son envie de meurtre continuelle. Bien sûr que Eun Sil désire tuer. C’est l’une des premières choses qui lui viennent à l’esprit quand elle ouvre les yeux le matin. Ça l’a chamboule tellement qu’elle n’ose sortir de son appartement et prend du retard à arriver à l’université à l’heure. Ça l’a chamboule tellement que son appartement ressemble à une terrain vague qu’on aurait retourné pour y trouver un peu d’or à se mettre dans la poche. Seulement, au contraire de l’or, pour Eun Sil, il s’agissait d’un peu de sang à se mettre sous la dent. Une inspiration profonde et elle regarde à l’extérieur de la salle. Il pleut encore. Les nuages sont toujours aussi gris. Ces journées maussades se transforment de plus en plus en journées déprimantes. Dans ces moments-là, Eun Sil, l’humaine, se serait ruée dans son lit devant un bon film avec un paquet de gâteaux ou de bonbons. Seulement, dans ces moments-là, Eun Sil, la vampire, se dit qu’elle ferait mieux de rentrer car l’odeur des humains se démultiplient quand leurs corps, leurs chevelures entrent en contact avec la pluie. C’est pire que l’odeur d’un chien mouillée…

« Rhm. Seo Eun Sil. »
« Professeur ? »
« Rejoignez l’élève qui vous fera des cours particuliers dans un quart d’heure dans la salle de TD de l’autre jour. Vous avez bien trop de lacunes et de dissipation pour réussir votre examen dans un mois, mademoiselle. »
« Mais… Monsieur… »

Elle se tait. Il vaut mieux. Il la regarde avec un regard froid et sévère avant de fermer la porte derrière lui et de la laisser seule dans cette salle vide. L’odeur de tout ce sang lui tourne la tête. Elle a besoin d’air, besoin d’eau.

Besoin de sang, nom de dieu. Besoin. Envie. Urgente.

Elle se mord la lèvre et sort de la salle en trombe, bousculant une ou deux élèves de deuxième année qui la regardent d’un drôle d’air. Elle est effrayée, Eun Sil, quand elle ne s’excuse pas et fuit comme une voleuse. Elle prie pour qu’aucune odeur n’attire son odorat et son esprit et s’engouffre dans l’escalier bondé pour monter jusqu’à la salle de TD que le professeur lui a indiqué. Seulement, elle étouffe tellement qu’elle ne peut en franchir le seuil, de peur d’y trouver une horde d’humains appétissants à se mettre sous la dent. On la bouscule. On ne s’excuse pas. Elle les regarde froidement, sa lèvre saignant au fur et à mesure qu’elle enfonce ses dents aiguisées dans sa chair. Elle se retient tellement. Elle refuse tellement de toucher à un cheveu d’un humain. Ouvrant une porte à la volée, elle la claque et s’enfonce dans la pénombre. Cette pièce était l’ancienne salle de TD dans laquelle ils avaient l’habitude de faire cours. C’était aussi la salle que le professeur lui avait indiquée, seulement elle ne remarqua pas tout de suite qu’elle s’y trouvait. Elle inspire profondément, doucement. Elle reprend ses esprits, mais derrière cette porte, les odeurs sont fortes, sucrées, caramélisées, mielleuses. Eun Sil ne contrôle plus, c’est vrai. C’est pour cela que la poche de sang qu’elle a soigneusement engouffré dans son sac se retrouve entre ses mains. Elle en boit un peu, mais se voit déjà en train de finir la poche qu’elle jette nonchalamment au fond de son sac. Se ressaisissant, elle se relève d’un bond. Elle epouste ses vêtements, essayant de paraitre plus sure d’elle. Seulement, elle ne l’est pas… vraiment pas. Quand elle relève son regard vers la porte qui claque, elle aperçoit avec effroi un jeune homme fronçant les sourcils.

Merde.

Elle ferme d’un coup sec son sac.

« Qui êtes… Qui êtes-vous ? »

La lumière s’allume. Son visage apparait. Pourquoi semble-t-il soudainement si familier ?

Les yeux grands ouverts, elle scrute son interlocuteur lentement. Elle cherche quelque chose qui puisse lui permettre d’identifier sa personnalité, sa race. L’odeur de son sang est différente de tous les autres humains. M’enfin, est-il seulement humain ? Elle déglutit difficilement et enfonce davantage la poche de sang vide dans son sac qu’elle pose lentement sur le rebord de la table. Elle se mord doucement la lèvre. A force de l’observer avec insistance, elle aperçoit sur son visage un ou deux traits qui lui semblent familiers. Seulement, elle ne voit d’où cela peut provenir. Eun Sil n’a rencontré que très peu de loups garoux et de vampires à son actif, pour le moment. Elle est bien trop effrayé pour les approcher, d’ailleurs. Eun Sil préfère fuir à toute vitesse quand elle reconnait l’odeur d’un vampire. Mais, cette fois-ci, Eun Sil doute réellement de l’identité de son « professeur ».

« votre professeur, je suis votre professeur de soutien, vous ne m’attendiez guère à l’instant ? »


Elle ne l’attendait pas, en effet. Elle était bien trop occupée à se nourrir en vitesse pour pouvoir accueillir le dit-humain, qui était promu à lui faire des cours particuliers. Seulement, il n’était pas humain, ce garçon-là. Elle le sentait tout au fond de ses entrailles. Elle le savait au fond d’elle. Elle refusait juste de se faire une raison. Si il était bel et bien un être surnaturel, qui était-il ? Vampire ? Loup ? Fantôme ? Du moins, les fantômes existent-ils vraiment ? Eun Sil croirait en n’importe quoi maintenant qu’elle se retrouve à vivre une expérience des plus incroyables, complexes et perturbantes. Elle soupire et acquiesce légèrement. Elle essaye de paraitre stable, mais la pauvre petite ne l’est pas. Elle se laisse emporter par l’odeur des humains qui passent dans ce couloir et tente de se focaliser sur le nouvel arrivant, sans réellement y parvenir. Pourtant, quand il se met à prononcer d’autres mots plus surprenant, Eun Sil commence à légèrement paniquée.

« vous en avez encore un peu là. »

Elle passe sa manche le long de sa bouche afin d’essuyer toute trace de sang sur ses lèvres. Elle déglutit difficilement et rougit furieusement. N’est-ce pas légèrement honteux qu’il ai pu la voir dans cet… état de démence, peut-on dire ? Elle a légèrement honte, mais le garçon ne s’arrête pas là. Tandis qu’elle scrute avec attention la façon dont ses traits s’étirent et se détendent. A ses yeux, le garçon est un des plus beaux spécimens qu’elle ai pu voir jusqu’à ce jour. Eun Sil a toujours eu de légers coups de foudre, des petites amourettes d’un ou deux jours, comme son voisin Jung Wan, qui ne cesse de lui répéter de quitter son grenier et de retourner dans son appartement, quand elle vient lui rendre visite. Qui ne cesse, aussi, de lui demander de le transformer pour la simple et bonne raison que dans dix jours ou dix ans, il peut crever là, sur le sol, sur ce parquet grinçant, sans même qu’elle puisse faire quelque chose pour l’aider, à part… ça. Eun Sil s’y refuse, évidemment. Pourquoi le transformerait-elle alors qu’elle est encore bien trop novice pour savoir se contrôler elle-même ? Elle le tuerait au lieu de le transformer, ça c’était certain.

« depuis quand êtes-vous vampire jeune femme ? et quel joli prénom portez-vous ? »

Elle déglutit difficilement. Comment sait-il ? A part la poche de sang qui est une preuve irrémédiable, il n’aurait pu savoir autrement qu’en étant un lui-même. Pourquoi n’a-t-elle pas senti la chose venir plus tôt ? Elle se mordit la lèvre doucement, un sourire gêné en coin. Devrait-elle répondre ou se taire et s’assoir pour suivre le dit-cours qu’il était censé lui donner il y a quelques secondes ? Au fin fond d’elle, Eun Sil s’en contre fiche de ce cours. Rencontrer quelqu’un de sa race, qui plus est, un garçon séduisant, n’est pas quelque chose qu’elle peut laisser passer si simplement. Eun Sil est bien trop effrayée d’être seule, pour laisser passer ça.

« M-Monsieur… J-Je…. Il… Il n’y a pas très longtemps, à vrai dire… Je… »

La pauvre ne comprend pas. La pauvre est perdue. Elle s’assoit doucement sur la chaise derrière elle et ramène ses jambes contre sa poitrine, entourant ses genoux de ses deux minuscules bras. Elle aurait voulu savoir comment elle en était arrivée là. A devoir errer pour trouver de la nourriture, ou plutôt du sang, à devoir fuir les humains comme la peste pour ne pas leur couper la trachée et se nourrir de ce sang délicieux qui l’appelle. Eun Sil se contrôle malgré tout, c’est indéniable. Pour une novice, il s’agit d’un exploit incroyable. Mais pour combien de temps cela peut-il durer ? Pendant combien de temps pourra-t-elle tenir avec ce bout de chemin quotidien ? Ses prunelles plantées dans celles du jeune homme, elle y trouve un air davantage familier. Un air qu’elle ne peut distinguer de toutes les personnes qu’elle connait depuis sa vie humaine. Elle fronce les sourcils et soupire. Un visage flou qu’elle voit dans ses rêves. Le visage de son « sauveur », comme elle dit. Seulement, elle ignore encore parfaitement les traits de son visage, les prunelles de ses yeux, la courbure de ses lèvres, de son nez, de ses fossettes. Elle ignore encore d’où vient cette voix rauque qu’elle avait entendue au loin, qui fit fuir les deux vampires qui s’attaquaient à elle après avoir tué ses parents. Elle ignore encore qui il est... Cependant, Eun Sil ne sait si elle doit lui être reconnaissance ou au contraire, lui en vouloir de ne pas l’avoir laissé se vider de son sang. Elle inspire profondément une bouffée d’air et se ressaisit doucement.

« Erm. Je suis nouvellement vampire, enfin… Vous avez dû le remarquer, n’est-ce pas ? Mais… Je… Je me contrôle à peu près bien. Un… Un « ami » se charge de me donner ce dont j’ai besoin. Et… Ehm… Vous êtes aussi un vampire ? C-Comment… C-Comment cela se fait-il que je ne l’ai pas découvert dès votre entrée dans cette pièce ? Les vampires ne sont pas censés avoir une odeur repérable et familière, ou… un truc de ce genre ? »

Que tu es mignonne Eun Sil… Que tu es naïve Eun Sil… Elle sourit, gênée. Elle s’exprime comme un pied. Ce n’est pas pour autant qu’elle se laisse abattre par le regard imposant du jeune homme. Aussi séduisant soit-il, elle se voit déjà lui tenir tête si il tente de la ramener dans son « camp ». Elle ne connait pas encore les règles des vampires, ni si il existe des camps à choisir, le mal ou le bien, les sanguinaires et les végétariens. Eun Sil ignore cela. Elle a juste lu des tas de livres sur la question. Elle s’imagine déjà en train de rejoindre les végétariens, le bien, et se retrouver à tuer de pauvres animaux sans défense. Seulement… n’est-ce pas ce qu’elle a fait afin de se nourrir pour la première fois, dans la forêt où elle s’est réveillée, chemise de nuit en sang ?

« Je m’appelle Eun Sil. Seo Eun Sil. J-Je… Prenez soin de moi. J’veux dire… Vous allez tenter de m’apprendre les maths, n’est-ce pas ? Je n’y comprends vraiment plus rien depuis… ma… Erm. Transformation. Avant, j’étais douée. Mais… »

Ô Chérie, ferme-là, un peu. Elle pose sa main sur sa bouche et baisse son regard. Serait-ce sa présence qui le trouble ? Non, ce n’est pas que ça… Il lui est vraiment familier, ce jeune homme-là. Son visage lui rappelle vaguement quelqu’un. Quelqu’un qu’elle ne connaitrait pas vraiment. Comme…

« Eh bien, par quoi allons-nous commencer, Professeur ? J’ai les bases, je vous préviens. Pas la peine de réitérer ce que je sais déjà, n’est-ce pas ? Et c’en est moins barbant pour vous. »

Elle tente de se mettre à l’aise et sourit légèrement. Seulement… Le malaise persiste à la troubler. Qui est-il bon dieu ?

« tu ne me quittes pas du regard et tu bois doucement, sinon je t’éclates. »

La petite ne comprenait guère ce qu’il se passait. Elle sentait juste le pouce du jeune homme s’enfoncer dans sa joue doucement, son menton épris par la paume de celui-ci. Il l’avait fait se lever lentement, apportant la gourde aux lèvres de la jeune femme. Un mauvais pressentiment traversait l’esprit de la jeune femme. Elle ne savait encore trop ce qui se passait, mais elle imaginait que dans cette gourde, il n’y avait pas un remède à tous ses problèmes, loin de là. Elle se mordit la joue intérieure, avalant lentement la gorgée qu’il lui offrait. Eun Sil ne connaissait toujours pas son nom, pourtant, elle semblait reconnaitre ses traits si fins. Son visage se trouvait si près du sien qu’elle sentait la respiration du jeune homme. Ses prunelles plongées dans les siennes, empêchaient la jeune femme de réfléchir correctement. Seulement, quand le liquide qu’elle venait d’avaler commença à réchauffer le fond de sa gorge et se diluer le long de sa trachée. Elle comprenait de quoi il s’agissait. Ses yeux s’écarquillèrent et elle resta tétanisée, le fixant avec effroi et surprise. Depuis tout ce temps, Eun Sil avait refusé de se nourrir de sang humain, pour la simple et bonne raison que l’attraction était bien trop forte pour qu’elle puisse céder au moins une unique fois. Ce vampire réduisait à néant tous les efforts qu’elle avait fournie jusque-là. Un regard froid se dessinait sur son visage et elle dégageait son visage de la main du garçon, reculant doucement.

A priori, elle réagissait tout de même bien au transfert. Le sang s’accolait aux parois de tout son organisme et la jeune femme semblait légèrement revivre. Son teint grisâtre s’embellissait légèrement. Elle grimaçait en apercevant son reflet dans une des vitres des fenêtres de la salle. Dehors, le ciel gris empêchait le soleil de faire son apparition et d’éclairer ses lieux. Eun Sil avait légèrement peur, maintenant qu’il lui avait fait gouter à ce fruit défendu qu’elle se refusait de toucher depuis déjà plusieurs semaines. Elle était légèrement hargneuse contre lui. Elle était légèrement en colère. Elle ne supportait pas qu’on force les choses. Seulement, il semblait qu’elle en avait réellement besoin. Eun Sil était trop perdue pour s’en rendre compte. Elle soupirait bruyamment et reculait de quelques pas. Ses prunelles ne quittaient pas celles du jeune homme. Elle semblait légèrement attirée par lui. Ses prunelles. Son corps. Sa mâchoire saillante. Ses fossettes rosées. Son nez fin. Ses lèvres charnues. En l’espace de quelques secondes, Eun Sil avait fait le tour de la description du visage de ce garçon. Il l’attirait, c’était sans équivoque, et voilà qui n’était pas une mince affaire alors qu’il venait de lui offrir sa première gorgée de sang humain. Elle grommela quelques mots et s’empara de sa poche de sang vide qu’elle lança sur le bureau en face d’elle. Elle le fixa quelques instants et baissa la tête. Un regard si imposant… Si impressionnante…

« Je… Je… Pour qui vous prenez-vous ? Depuis quand on force les nouveaux nées à se nourrir de sang humain ? A ce que je sache, je suis libre de mes actes. J’allais y toucher un jour. Je… Vous n’êtes qu’un… »

Ô chérie… Pourquoi essayes-tu d’être vilaine quand tu ne l’es pas ? Elle grognait lentement. Elle balança son sac sur le sol, ses cahiers, trousses et stylos se répandant sur le marbre froid de la pièce. Elle était bel et bien en colère, mais ne le montrait pas assez. Eun Sil était si peu expressive, humaine, que maintenant qu’elle vivait sous une autre race, sous d’autres attraits, elle se retrouvait confronter à une personnalité qui se mélangeait à la sienne. Elle devenait certes plus agressive, mais la douceur qui émergeait de ses bras quand elle enlaçait quelqu’un ne l’avait pas quitté. Au contraire, Eun Sil redemandait davantage de douceur et d’attention qu’on ne le penserait. Les parents d’Eun Sil, ses amis, sa meilleure amie… Tout cela lui manquait atrocement. Etait-ce la vraie raison de son énervement ? Peut-être bien… Elle ne savait pas vraiment elle-même. Elle lui en voulait surtout à lui. Il lui forçait légèrement la main en agissant ainsi. Mais le pire… ce n’était pas le fait qu’elle déteste cela. C’était la façon dont elle se surprenait d’apprécier le goût et la chaleur de ce sang inconnu. C’était la façon dont elle se surprenait à guetter chaque geste du garçon. C’était la façon dont elle le scrutait, l’observait, le détaillait. Autrefois, humaine, elle n’arrivait même pas à bien détaillé le regard, les traits du visage des garçons dont elle « tombait » amoureuse. Ce n’était que des amourettes d’une journée, d’un mois, des petits coups de foudre de gamine. Pourtant, cette fois-ci, ce garçon-là, il était différent. Eun Sil le sentait. Eun Sil le voyait. Ce n’était pas juste son statut de vampire qui lui provoquait cette sensation ; c’était autre chose. Quelque chose qu’elle ignorait encore… quelque chose qu’elle trouverait un jour…

« Qui êtes-vous pour agir de la sorte ? Vous pensez pouvoir récupérer une autre petite nouvelle vampire dans vos rangs, c’est ça ? Qui m-me dis que ce n’est pas vous qui avez tu-tué mes parents ? Ou vos a-amis. Ou … »

Sa voix se cassa. Sa voix se brisa. Un léger silence l’empêcha de continuer. Elle perdait le fil de ce qu’elle disait. Eun Sil aurait préféré pleurer, et fuir, plutôt que de parler. Elle parlait trop. C’était ce qu’il lui avait dit quelques minutes avant. Elle parlait trop et ses faiblesses se dévoilaient peu à peu. La mort de ses parents. La solitude dans laquelle elle baignait. La perte de tout ce qu’elle aimait. La peur d’être à nouveau trahie. Eun Sil se mordit la lèvre. Les lèvres montaient lentement à ses yeux qui lui piquaient. Seulement, elle les retenait. Elle essayait, du moins. Elle ne parlait plus. Elle le scrutait juste. Son regard… Il la rendait légèrement folle. Elle ne savait que trop faire ou penser. Et quand ses prunelles réussissaient à croiser à nouveau celles du garçon, elle déglutissait difficilement. Elle ne comprenait pas pourquoi ; mais Eun Sil était comme obnubilé par la profondeur de son regard. Elle baissait à nouveau son regard. Une larme coulait lentement. Le sang lui chauffait la gorge et maintenant, elle en désirait encore. C’était pour cela qu’elle n’en voulait pas. Elle savait qu’à un moment donnée, elle en revoudrait. Qu’elle serait capable de tout pour en avoir… Qu’elle tuerait.

« P-Pou-Pourquoi… Pourquoi on m’a fait ça… »

Pourquoi t’a-t-on transformé ? Pour que tu souffres, ma pauvre…

« Cesse de te plaindre, tu es en vie voilà pourquoi on t’a fait ça ! Probablement pour te sauver alors arrêtes de te lamenter et penses à ceux qui ne sont plus de ce monde. »

Pendant un instant, la demoiselle le fixa d’un air ahuri. Surprise par les dires de son interlocuteur, Eun Sil échappa un hoquet de surprise. Ses prunelles ne quittaient pas celles du garçon. Au contraire, elle cherchait à comprendre comment il pouvait en arriver à ce genre de conclusion. Il ne savait pas ce qu’elle avait vécu. Il ne savait pas ce qu’elle aimait, ce qu’elle chérissait. Tout cela, elle l’avait perdue en un millième de secondes. Il a suffi d’une mauvaise rencontre et de deux crocs aiguisés pour se retrouver agonisante dans un bois ténébreux non loin de Gangnam. Eun Sil lui jeta un regard noir et tenta de reculer, mais ses pieds l’empêchaient de bouger un millimètre de plus. Elle fronça les sourcils et échappa un léger grognement de mécontentement. Il a réussi à la tétaniser de peur, ce con-là.

« Je m’appelle Zayne, mais on m’appelle Amon. Les vampires m’appellent Amon. Je suis un descendant direct de Dracula et je suis chargé de traquer tous les délinquants c’est-à-dire tous les vampires qui ne respectent pas les régles et se permettent de tuer des humains. Or tu risques rapidement de devenir une de mes proies si tu n’acceptes pas de boire du sang humain. »

Devant les flots de paroles du garçon, elle échappa un léger soupir d’exaspération et leva les yeux au ciel. Eun Sil se racla la gorge légèrement comme pour essayer de le faire taire. Elle n’a jamais vraiment été une délinquant qui déroge les règles ; loin de là. A l’école, Eun Sil a toujours été la petite élève préféré de tous les professeurs, la chouchoute, en somme. Ceci dit, il lui est arrivé une ou deux fois de se retrouver en retenue pour diverses raisons idiotes. Mais ça… ce n’était qu’un détail. Les règles dont il parlait, elle n’en connaissait pas la couleur. C’était pour cela qu’elle agissait comme si elle n’en avait rien à faire. Elle inspira profondément une bouffée d’air et passa une main dans ses cheveu pour en démêler les quelques nœuds qui s’y sont formés. Zayne… Zayne, c’est son prénom. Un rictus fin se dessina sur ses lèvres. Elle aimait ce prénom. Elle aimait la douceur de sa voix. Elle aimait le ton avec lequel il essayait de l’effrayer. Des larmes séchaient le long de ses joues. Ses yeux lui piquaient. Ses cils se collaient les uns contre les autres. Elle vint passer sa main sur ses yeux, pour les frotter énergiquement. Puis, il reprenait à tue-tête, comme si il avait préparé son monologue à l’avance.

« C’est la première et dernière fois que je t’autorise à être faible, je ne veux plus jamais te voir pleurer que ce soit clair. Et le sang que tu viens de boire et bien humain mais la donneuse et toujours vivante. Boire du sang humain ne signifie pas forcément tuer alors tu vas me faire un plaisir de te nourrir avant de ne devenir une délinquante comme ceux qui ont tués tes parents. »

Elle déglutissait difficilement. Avait-t-il tort ou raison ? Elle hésitait toujours à le croire. A vrai dire, il l’effrayait plus qu’autre chose. S’étant saisit de son t-shirt, il l’avait attiré contre lui. Dieu sait combien de fois Eun Sil a refusé tout contact physique avec un homme jusqu’à aujourd’hui… Elle s’est lentement laisser faire, les yeux écarquillées. Les jambes du jeune homme avaient entourés sa taille pour avoir davantage d’emprise sur elle. Pendant un instant, elle fixait ses lèvres charnues qui se trouvaient à quelques centimètres des siennes. Elle avait du mal à respirer correctement. Son cœur battait à tout rompe dans sa poitrine. Eun Sil n’avait surement jamais ressenti cela, mais elle ne voulait pas croire que ce genre de méthode allait marcher sur elle. Silencieuse, elle le laissa poser sa tête sur son épaule. Eun Sil en profita pour détailler avec un peu plus de précision les traits de son visage, la courbure de sa mâchoire. Elle avait même eu le temps de bien s’imprégner de son odeur, histoire de le reconnaitre la prochaine fois qu’il la surprendrait en train de boire une poche de sang animal. Enfin… Qui a dit que la prochaine fois ce ne sera pas du sang humain ? Soupirant, elle sentait la chaleur de son souffle dans sa nuque, ce qui l’empêchait de réfléchir.

« J’arrive pas à vous cerner, Zayne. »

Silencieuse, elle venait de lâcher trois mots après trois minutes d’étreinte interminable. Les larmes ne coulaient plus. Les mots tranchants non plus. Eun Sil avait repris ses esprits lentement. Elle ne savait encore comment cela était arrivé, car, autrefois, il lui fallait bien une heure ou deux pour calmer ses nerfs quand elle éclatait. Et encore… Quand la demoiselle était humaine… Ce n’était pas juste un sac jeté au sol. C’était pire que ça. Un ouragan vivant. A présent, plus une trace de son humanité de la mettait à l’épreuve. Tous les sentiments, toutes les anxiétés, tout ce qui la représentait auparavant, tout avait bel et bien disparu. Eun Sil n’était plus autant la même. Son caractère avait diminué sur certains points. Alors que d’autres… Eun Sil qui était caline et douce se retrouvait avec une agressivité maladive et cette envie d’avoir le dessus, cette envie de meurtre qui la tiraillait. Elle se mordit la lèvre et releva son regard vers lui, relevant doucement la tête. Seulement, elle ne quittait pas l’étreinte dans laquelle il l’a maintenait. Elle inspira profondément. Eun Sil ne comprenait pas réellement pourquoi, mais elle semblait réellement attirer physiquement par le jeune homme en face d’elle. Pas seulement quand leurs regards se croisaient. Ses mains posées sur ses hanches la faisaient frissonner. Son souffle rendait la tension dans la pièce particulièrement électrique. Eun Sil déglutit. Son regard croisa à nouveau le sien. Merde, mais…

« Passe la-moi ta gourde. »

Elle s’empara de la gourde d’un geste vif et vint en avaler une ou deux gorgées pour faire bonne figure. Comme quoi, le petit bébé apprend vite, n’est-ce pas ? Eun Sil soupira bruyamment et laissa son visage se rapprocher dangereusement de celui de Zayne. Elle inspira profondément une bouffée d’air, tandis que son nez vint frôler le sien. Puis ses mains vinrent se poser de chaque côté de la table pour ne pas tomber. Eun Sil se mordit la lèvre. Elle avala encore une gorgée.

« Je bois tout, si tu me fais une faveur, Zayne. »

Déjà pour elle, elle s’interdisait de l’appeler Amon, comme il lui avait expressément fait remarquer que tous les vampires l’appelaient ainsi. Elle échappa un léger sourire, rayonnant. Son visage semblait bien plus jolie, beaucoup moins terne. Il retrouvait des couleurs. Ses prunelles étaient beaucoup moins sombres et glaciale. Elle en appréciait doucement le gout ; elle en appréciait doucement la couleur. Eun Sil lâcha la gourde qui tomba au sol et elle vint se redresser, son torse collé à la poitrine de la jeune femme. Elle le fit glisser lentement dos au bureau sur lequel il se tenait. Eun Sil glissa au-dessus de lui. Elle attrapa son col de ses deux mains, se trouvant à califourchon sur lui.

« Vous, les vampires, vous savez faire des trucs, n’est-ce pas ? Alors, tu peux me montrer ? Ca sera notre leçon du jour, en échange des cours particuliers que… »

Cours particuliers. Et si quelqu’un entrait ? Elle se tut quelques instants. Eun Sil était bien trop naive pour réellement vouloir ce genre de choses. Alors pourquoi ? Pourquoi maintenant ? Parce qu'on ne traite pas Eun Sil, la nouvelle née, comme un bébé.

« Cette position est-elle réellement nécessaire pour t’apprendre ce que nous vampires, nous savons faire ? »

Il jouait avec ses nerfs. Il la rendait particulièrement irrité. Il l’irritait. Pour de vrai. D’ailleurs, elle lui en voulait de la prendre pour ce qu’elle n’est pas.

Ceci-dit…

Ma pauvre petite Silly, tu es bien ce qu’il pense que tu es.

Elle échappa un frisson quand il glissa sa main dans la nuque de la jeune femme. Seulement, il ne s’arrêta pas là. Surprise, elle s’attendait à un de ses baisers langoureux que l’on voit dans tous les films d’Hollywood. Seulement, il ne s’agissait pas de cela. Ô non, pas du tout… La tête de Eun Sil glissa dangereusement vers celle du garçon, tandis qu’il venait embrasser son cou. Elle échappa un léger cri de surprise. Non, tu ne n’y attendais pas, petite Eun Sil. Ni à … Ses lèvres embrassèrent la nuque de Eun Sil. Puis, elle sentit quelque chose de froid toucher sa peau frêle. Enfin, une légère douleur cependant assez impassible pour qu’elle n’émette aucun réel bruit de mécontentement ou de surprise. Les crocs de Zayne s’enfoncèrent dans la peau blanchâtre de son cou. Seul la couleur de son sang pouvait être perçu. Rouge vermeille. Rouge foncé. Une légère gouttelette glissa le long de sa peau et elle se mordit la lèvre tandis qu’il la faisait chavirer sur l’autre côté du bureau. Elle pouvait ainsi apercevoir la chaleur qui émanait de son visage. Ses prunelles brillaient. Il venait de se nourrir d’elle sans qu’elle le lui accorde. Il venait de la « souiller » davantage qu’elle ne se sentait l’être. Eun Sil grimaça. Jouer avec le feu n’était pas une aussi bonne idée qu’elle l’avait pensé. Elle se trompait encore trop lourdement sur le sujet des vampires. Si imprévisible. Si froid. Si impossible à discerner. Elle aussi sera dans ce cas de figure, dans quelques années. Pour le moment, ses actions, ses réactions, ses pensées, étaient si prévisibles qu’elle ne douterait pas qu’il puisse lire en elle comme avec un livre ouvert. Elle déglutit difficilement, tandis qu’elle admirait le faciès de Zayne. Il était beau. Bien trop beau. Bien trop imposant. Bien trop musclé. Bien trop puissant. Et c’est de ça dont elle devrait avoir peur au lieu de vouloir jouer les minettes en chaleur.

« ne jamais faire confiance à un autre vampire que toi-même, la prochaine fois je pourrais bien t’arracher un lambeau de peau. Et contrôle tes hormones, ce n’est pas parce que je te respecte que je ne suis pas un homme. »

Elle resta silencieuse un moment. Non pas qu’elle réfléchissait sur ses paroles. Eun Sil essayait tant bien que de mal de se contenir un instant. Quelques fois, quand Eun Sil était petite, il lui arrivait de pleurer pour un rien et sauter de joies quelques minutes plus tard. Un jour, un garçon a décidé de lui en faire voir de toutes les couleurs. Il l’a poussé dans la boue. Elle a pleuré. Puis s’est vengé. Eun Sil n’a jamais réellement apprécié qu’on ai le dessus sur elle. Petite, c’était la petite fille intelligente de l’école, le pot de colle, la chouchoute et tout le monde faisait en sorte de lui rendre une vie misérable et difficile. Seulement, ils ne se doutaient pas de la ténacité de Eun Sil. Tout comme Zayne, à ce moment-là, ne pouvait s’en douter aussi. Après tout, il ne la connaissait pas. Après tout, il ignorait tout de sa vie et il ignorait ce qu’elle avait vécu, il ignorait tout ce qu’elle avait perdu tout au long de sa vie. Eun Sil grimaça douloureusement quant au poids du jeune homme au dessus d’elle. Elle se mordit la lèvre.

« Vous êtes… mhm. »

Il n’y avait pas de mot pour définir la façon dont elle se sentait. Il avait bu un peu de son sang et la tête lui tournait légèrement. Allongée de tout son long sur la table, elle glissa ses mains sur le col du garçon pour l’attirer davantage contre elle. Elle sent la chaleur de sa peau contre ses doigts. Elle inspira profondément une bouffée d’air et rapprocha son visage de celui de Zayne. Elle pouvait y voir sa peau brillante et magnifique. Elle pouvait y distinguer les traits de son visage, la courbure de ses lèvres. Elle adorait ça bon dieu ; Pourquoi adorait-elle ça ?

« Pourquoi t’as fait ça ? tu crois que c’est drole de se nourrir d’une novice qui ne contrôle pratiquement rien ? Je… »

T’as pas aimé, ça peut-être ? Si. Elle a adoré. Il l’a juste un peu plus affaibli qu’avant. Il l’a juste rendue davantage idiote et novice. Il l’a juste aplati comme une crêpe avec ses mots et ses gestes. Trop puissant. Bien trop.

« Pourquoi… Pourquoi tu es… Méchant ? »

Il ne l’était pas. Mais elle ne trouvait pas d’autres mots ; son cerveau était déconnecté.

« Si… Mesquin. Euh… Impassible ?”

Bien trop perturbée.

(ai fait troop coooourt TT mais j'dois y aller TT )

Quand elle sentit sa main glisser le long de sa cuisse, Eun Sil échappa un sursaut de surprise. Quand ses doigts entrèrent en contact avec sa peau, elle ne put retenir un soubresaut, un mordillement de lèvre et un regard vers lui. Elle cherchait à retrouver son regard, comme elle cherchait à le fuir. Il n’avait sans doute pas tort. C’était aussi la raison pour laquelle Eun Sil se refusait de le regarder dans les yeux. Assise sur le rebord de la table, elle entoura simplement la taille du garçon de ses jambes pour le rapprocher d’elle lentement. Elle voulait user de sa sensualité comme elle admirait son propre courage de ne pas fondre en larmes à chaque fois qu’elle touchait une parcelle du corps de son interlocuteur. Eun Sil n’a jamais rien fait de très vulgaire ou sexuel dans sa vie. Elle n’a jamais eu une grande liste de prétendants sous sa main. Elle n’a jamais eu grande expérience en la matière avec les garçons. C’était pour cela qu’elle agissait un peu bêtement et qu’elle cherchait ses marques dans des choses qu’elle ne connaissait pas. Elle ne connaissait pas la nature, la race à laquelle elle appartenait maintenant, comme elle ne connaissait pas les bases des relations sexuelles ou des baisers farouches et langoureux que de nombreux couples mettaient en scène dans le bus qu’elle prenait chaque jour pour aller à l’école. Eun Sil baissa son regard sur les mains de Zayne posées sur ses cuisses. Les siennes glissaient le long de la table pour les rejoindre. Ses doigts se faufilèrent entre ceux de Zayne. Elle se refusait presque d’y croire, cependant, elle semblait plutôt à l’aise avec lui. Malgré sa façon d’être violent, d’être mesquin, de lui parler sur un ton qui ne lui plaisait guère… En fait. Eun Sil s’en fichait éperdument. Elle aimait sa stature, sa façon de se tenir, sa façon de la regarder, de l’attirer, de bouger, de la toucher. Eun Sil sentait son corps vibré à chaque toucher qu’il employait à déposer sur elle. Elle inspira deux ou trois bouffées d’air, toujours silencieuse. Que devait-elle faire maintenant ? Elle devait le fuir, partir, courir loin et ne plus le revoir ? Elle devait répondre à ses avances et ses désirs et faire ce qu’il voulait qu’elle fasse ? Eun Sil était légèrement perdue et désarçonnée. Peut-être qu’il avait raison en disant qu’elle était faible. Seulement qui ne le serait pas après avoir perdu ses tendres parents, sa tendre et unique famille, ses amis qui la croient en deuil et n’imaginent pas à quel point c’est pire que cela. Eun Sil n’était plus la petite humaine fragile, timide et maladroite. Elle ne devait plus l’être du moins. La fragilité morale et physique qu’elle éprouvait à l’instant démontrait parfaitement à quel point elle semblait désemparée et perdue. Eun Sil ne savait que faire, comme elle ne pouvait savoir si il était sérieux en parlant de lui apprendre à se défendre, et à faire bien d’autres choses encore. Elle tremblotait légèrement. Trop faible… Trop éprise… Eprise ? Eprise de qui ? De lui ? Eun Sil ne peut pas. Eun Sil ne doit pas. Ce serait la pire des choses n’est-ce pas ? Elle soupira bruyamment et releva son regard vers lui, sans réellement s’attendre au frisson parcourut son échine dès que leurs prunelles entrèrent en contact. Pourquoi tant d’effets, merde. C’était une bonne question, sans réponse. Evidemment.

« T’es le pire des vampires que j’aurais connu, tu le sais ça ? »

Oh, oui, qu’il devait le savoir. Seulement, Eun Sil aimait rapporter toujours les choses à voix haute. Que ce soit pour elle, pour quelqu’un autre. Eun Sil posait toujours les questions sèchement et se fichait bien que ce ne soit pas dans la nature d’un « vampire ». Ses doigts se resserrèrent entre ceux de Zayne. Elle enfonçait presque ses propres ongles dans sa chair. Eun Sil s’en fichait. Maintenant, elle n’aurait jamais réellement mal. Maintenant, elle ne souffrirait que partiellement, intérieurement. Elle se mordit l’intérieur de la joue. Son regard ne quittait pas celui de Zayne, dans lequel elle se voyait pratiquement plongé tête baissée. Il l’hypnotisait. Il l’empêchait de reporter son attention sur autre chose que sur lui. Elle sentait les palpitements du cœur de Zayne. Elle les entendait distinctement, car, à part eux, il n’y avait personne d’autre dans cette pièce. C’était un endroit intime, silencieux, noir, sombre. C’était leur… endroit. Pourrait-on dire. Seulement, elle n’imaginait pas une seule seconde se voire faire des choses légèrement déplacées, sexuelles et sensuelles. Eun Sil ne l’était pas : sensuelle. Oh que non. Il aurait fallu lui apprendre à mieux danser sur une chanson du moulin rouge, et peut-être, éventuellement, qu’elle aurait eu la possibilité d’attirer le regard et les mains des vieux pervers du quartier. Car, même eux, ne s’intéressaient pas réellement à son charisme, fâcheusement ridicule et faible. Eun Sil voulait se sentir belle et désirée. N’était-ce pas la raison pour laquelle, elle s’était soudainement prise dans l’envie de se mettre au-dessus de lui avant qu’il tente de la manger toute crue ? Eun Sil avait beau être affaibli par la morsure du jeune homme, il n’en demeurait pas moins qu’elle avait envie d’essayer une quelconque nouveauté. Elle se mordit la lèvre. Qu’elle en ai le droit ou pas, elle s’en fichait particulièrement. Zayne voulait qu’elle se nourrisse enfin. Zayne voulait qu’elle goute le sang en lui-même. Alors pourquoi pas ne s’attaquer par celui qui coulait dans ses veines ? Elle échappa un léger gémissement quant à la chaleur des doigts du garçon sur sa cuisse. Elle pouvait parfaitement sentir la longueur de ses phalanges allongées le long de sa cuisse, et le bout de ses doigts placés bien trop près de son entrejambe. Pourquoi résistait-elle ? Pourquoi se résistait-elle ?

« Tu… Ta-… »

Elle ne trouvait pas ses mots. Eun Sil se tut un instant et vint placer ses bras autour du cou du jeune homme. Elle se rapprocha dangereusement de lui, ignorant rapidement les mains du garçon qui glissaient dangereusement vers ce qu’elle considérait comme un espace interdit, intime et impossible à approcher. Eun Sil était pudique. Carrément pudique. Elle refusait qu’on la voit nue. Elle refusait qu’on lui fasse des choses perverses sans son autorisation. Seulement, Bae Zayne n’avait pas besoin de son autorisation, lui. Il se la prenait sans l’entendre de sa vive voix de jeune fille timide. C’était pour cette raison qu’elle approchait son visage près de celui de Zayne. Pour cette raison qu’elle efleurait les lèvres du garçon dangereusement, que son nez se frottait au sien, que ses mains se baladaient dans sa chevelure noir de jais en bataille. Tout cela, elle l’appréciait. Elle « apprenait » à découvrir la sensualité dont elle n’avait jamais usée. Ses dents vinrent mordiller le lobe de l’oreille du garçon. Ses lèvres vinrent se déplacer dangereusement le long de son cou et puis elle hésita quelques instants. Et si elle ne devait pas ? Et si il s’énervait ? Et si… Ô diable les « et si », eun sil… Elle levait les yeux au ciel. Trop pathétique. Elle se sentait bien trop pathétique. Et pourtant, elle se mordit la lèvre avant de planter ses crocs dans le cou de Zayne et d’y extraire le sang dont elle a besoin. Etait-ce délicieux ? Elle n’aurait pu le dire pour le moment. Eun Sil s’accrochait à lui, tel un koala. Ses ongles s’enfonçaient dans son dos. Ses jambes se resserraient autour de sa taille. Elle se délectait de ce qu’elle faisait, mais elle avait bien trop honte pour continuer plus de deux minutes de plus. Reculant sa tête vivement, ses cheveux retombèrent dans son dos, quelques gouttelettes de sang coulaient le long de ses lèvres. Elle avait tellement honte d’agir de la sorte. Elle avait tellement apprécié, se nourrir de son sang à lui, qu’elle en voudrait bien encore… qu’elle le voudrait bien, lui, simplement.

« Je… Je suis désolée… Il… Il faut vraiment que… Que tu m’apprennes à me. Erm. Tenir correctement. »